Le T-shirt finisher : plaisir narcissique ou juste
récompense du guerrier ?
A force d’enchainer les courses, mon placard finit par
accumuler quantité de t-shirts finishers, fièrement glanés sur les sentiers de
France et de Navarre.
Il y a 3 semaines, je me suis essayé à une course un peu
rude, la CCC, que je n’ai pas terminé, m’étant arrêté au bout de 72km et 4200m
de D+ ‘seulement’.
Les finishers de la CCC gagnent une polaire sans manches,
qui n’est, il faut le dire, pas du meilleur goût. En revanche, il n’est pas
besoin de terminer la course pour repartir avec son T-shirt jaune pétard UTMB
2014.
Une semaine de repos plus tard, je rechausse les baskets et
part trottiner dans le bois de Boulogne vêtu de mon t-shirt jaune poussin, sans
y prêter plus d’attention que ça.
C’est alors que je me rend compte d’un phénomène des plus
étrange : à mon passage, les têtes se tournent avec un air admiratif
devant le T-shirt UTMB, que je porte alors dans le but de lui faire courir
les 30km qui manquaient à ma course, histoire de boucler psychologiquement ces
101km… S’ils savaient que je m’étais arrêté avant la fin, leur réaction serait
très certainement différente ; cet air admiratif donnerait place à un
sourire moqueur sur lequel on pourrait lire comme dans un livre ouvert leur
plaisir cynique de voir un concurrent échouer J
Le T-shirt finisher a donc une capacité de communication,
voire peut-être de manipulation, dont je ne soupçonnais pas la portée !
Je me suis posé pendant cette heure de footing la question
suivante : portons-nous nos T-shirts finishers « pour le
plaisir », ou bien cherchons nous le regard des autres, en essayant de
leur montrer que nous sommes plus fort, plus beau, plus ‘facile’, que l’on est
pas là pour faire un footing, mais pour préparer le maxi-trail des sommets de l’Everest,
rien que ça ?
Bien entendu, la réponse à cette question dépend de chacun.
Certains vont se la jouer, et d’autres s’en fichent éperdument.
En revanche, plusieurs pistes de réflexion peuvent se
discuter…
1) Il y a finisher et
finisher
En effet, à la fin, on reçoit tous le même t-shirt. Mais sur
un 80km, les premiers ‘amateurs’ vont mettre 7h 7h30, et les derniers pas loin
de 12h.
Donc un t-shirt ne permettrait pas réellement de cerner le niveau
d’un coureur ; sa capacité à avaler des kilomètres peut-être, mais pas son
soi-disant niveau.
Mettre un t-shirt finisher lorsque l’on arrive bon dernier d’un
trail montre que l’on a simplement envie de montrer que l’on est fier d’être
venu à bout d’une telle épreuve, sans avoir la prétention d’être une gazelle.
Lorsqu’on fait un footing, les personnes que l’on croise ne
savent pas si l’on est arrivé premier ou dernier.
Donc Narcisse 0, guerrier 1
2) Cela fait partie
du jeu !
Que l’on
arrive premier ou dernier, dans le trail, personne ne gagne réellement d’argent.
Si on pratique
ce sport un peu extrême, c’est avant tout par goût de l’aventure, de la nature,
de conditions extrêmes, d’effort long…
Et aussi
parce qu’on est un brin cinglé, il faut se l’avouer.
Je n’ai
jamais croisé de trailer vénal, qui se la joue et soit là pour tout gagner :
argent, mannequins, et j’en passe !
En
général, c’est plutôt l’inverse ; on discute, on échange nos expériences,
on partage nos douleurs, et on s’entre-aide jusqu’à la ligne d’arrivée, que l’on
passe glorieusement en marchant comme un canard boiteux.
Porter
le t-shirt d’une course pendant laquelle on a tant partagé résulterait donc
plus d’une volonté d’extérioriser ce que l’on a vécu de l’intérieur pendant de
longues heures.
Narcisse
toujours 0, guerrier 2
3) Mais quand même…
Traileur
ou pas, on s’entraine tous un peu sur stade. Et qui dit stade dit également ‘entourage’,
‘fractionné’, ‘performance’.
Là, pour
le coup, on vient pour envoyer du bois. Et on peut dire ce que l’on veut, mais
perso, je sais très bien que si je viens fractionner autour du stade de
puteaux, et qu’il va y avoir du monde, je vais être content de montrer que les
400, je mets pas 1’30 pour les boucler. Assorti d’un joli t-shirt des 80km de l’ecotrail,
dont beaucoup ont entendu parler dans le coin, et la boucle est bouclée.
J’ajouterai
également que je pense que cela m’aide à pousser mes exercices plus loin ;
histoire de rester à la hauteur du t-shirt fièrement arboré.
Narcisse
1 donc, et guerrier reste à 2.
Pour
conclure, chacun a sa propre personnalité ; mais je ne pense pas qu’il y
ait vraiment de l’arrogance dans le fait de porter un t-shirt finisher.
Les
efforts demandés lors d’un trail font tout simplement que l’on est content et
fier de porter le t-shirt qui montre à soi-même et aux autres que l’on est venu
à bout de cet effort particulièrement intense.
Bien
entendu, si on fractionne à côté de quelqu’un d’autre, on va se tirer la
bourre, et peut-être se servir du t-shirt porté pour montrer qu’on en a sous le
pied.
Mais
comme je le mettais plus haut, le t-shirt ne présage en rien du niveau de l’athlète,
si ce n’est de sa capacité à être assez fou pour s’inscrire à un trail et le
finir (ou pas d’ailleurs, ayant moi-même 2 t-shirt finishers de courses pas
terminées).
Et puis
si vous souhaitez utiliser l’espace communicatif que représentent votre abdomen
et votre dos pour des motifs plus originaux que les courses auxquelles vous
avez participé, n’hésitez pas à aller jeter un œil à Douzaleur, qui est une
boite montée par des copains et qui propose des t-shirt avec des messages
décalés comme ‘mon groupe sanguin, D+’, qui dénote un peu lorsque l’on s’entraine
sur la platitude du bois de Boulogne J
Beau billet… et belle pub! Continue comme ça! A plus, Mat
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