jeudi 25 septembre 2014

Le T-shirt finisher : plaisir narcissique ou juste récompense du guerrier ?


Le T-shirt finisher : plaisir narcissique ou juste récompense du guerrier ?

A force d’enchainer les courses, mon placard finit par accumuler quantité de t-shirts finishers, fièrement glanés sur les sentiers de France et de Navarre.
Il y a 3 semaines, je me suis essayé à une course un peu rude, la CCC, que je n’ai pas terminé, m’étant arrêté au bout de 72km et 4200m de D+ ‘seulement’.
Les finishers de la CCC gagnent une polaire sans manches, qui n’est, il faut le dire, pas du meilleur goût. En revanche, il n’est pas besoin de terminer la course pour repartir avec son T-shirt jaune pétard UTMB 2014.

Une semaine de repos plus tard, je rechausse les baskets et part trottiner dans le bois de Boulogne vêtu de mon t-shirt jaune poussin, sans y prêter plus d’attention que ça.
C’est alors que je me rend compte d’un phénomène des plus étrange : à mon passage, les têtes se tournent avec un air admiratif devant le T-shirt UTMB, que je porte alors dans le but de lui faire courir les 30km qui manquaient à ma course, histoire de boucler psychologiquement ces 101km… S’ils savaient que je m’étais arrêté avant la fin, leur réaction serait très certainement différente ; cet air admiratif donnerait place à un sourire moqueur sur lequel on pourrait lire comme dans un livre ouvert leur plaisir cynique de voir un concurrent échouer J

Le T-shirt finisher a donc une capacité de communication, voire peut-être de manipulation, dont je ne soupçonnais pas la portée !

Je me suis posé pendant cette heure de footing la question suivante : portons-nous nos T-shirts finishers « pour le plaisir », ou bien cherchons nous le regard des autres, en essayant de leur montrer que nous sommes plus fort, plus beau, plus ‘facile’, que l’on est pas là pour faire un footing, mais pour préparer le maxi-trail des sommets de l’Everest, rien que ça ?

Bien entendu, la réponse à cette question dépend de chacun. Certains vont se la jouer, et d’autres s’en fichent éperdument.

En revanche, plusieurs pistes de réflexion peuvent se discuter…

1) Il y a finisher et finisher
En effet, à la fin, on reçoit tous le même t-shirt. Mais sur un 80km, les premiers ‘amateurs’ vont mettre 7h 7h30, et les derniers pas loin de 12h.
Donc un t-shirt ne permettrait pas réellement de cerner le niveau d’un coureur ; sa capacité à avaler des kilomètres peut-être, mais pas son soi-disant niveau.
Mettre un t-shirt finisher lorsque l’on arrive bon dernier d’un trail montre que l’on a simplement envie de montrer que l’on est fier d’être venu à bout d’une telle épreuve, sans avoir la prétention d’être une gazelle.
Lorsqu’on fait un footing, les personnes que l’on croise ne savent pas si l’on est arrivé premier ou dernier.
Donc Narcisse 0, guerrier 1

2) Cela fait partie du jeu !
Que l’on arrive premier ou dernier, dans le trail, personne ne gagne réellement d’argent.
Si on pratique ce sport un peu extrême, c’est avant tout par goût de l’aventure, de la nature, de conditions extrêmes, d’effort long…
Et aussi parce qu’on est un brin cinglé, il faut se l’avouer.
Je n’ai jamais croisé de trailer vénal, qui se la joue et soit là pour tout gagner : argent, mannequins, et j’en passe !
En général, c’est plutôt l’inverse ; on discute, on échange nos expériences, on partage nos douleurs, et on s’entre-aide jusqu’à la ligne d’arrivée, que l’on passe glorieusement en marchant comme un canard boiteux.
Porter le t-shirt d’une course pendant laquelle on a tant partagé résulterait donc plus d’une volonté d’extérioriser ce que l’on a vécu de l’intérieur pendant de longues heures.
Narcisse toujours 0, guerrier 2

3) Mais quand même…
Traileur ou pas, on s’entraine tous un peu sur stade. Et qui dit stade dit également ‘entourage’, ‘fractionné’, ‘performance’.
Là, pour le coup, on vient pour envoyer du bois. Et on peut dire ce que l’on veut, mais perso, je sais très bien que si je viens fractionner autour du stade de puteaux, et qu’il va y avoir du monde, je vais être content de montrer que les 400, je mets pas 1’30 pour les boucler. Assorti d’un joli t-shirt des 80km de l’ecotrail, dont beaucoup ont entendu parler dans le coin, et la boucle est bouclée.
J’ajouterai également que je pense que cela m’aide à pousser mes exercices plus loin ; histoire de rester à la hauteur du t-shirt fièrement arboré.
Narcisse 1 donc, et guerrier reste à 2.

Pour conclure, chacun a sa propre personnalité ; mais je ne pense pas qu’il y ait vraiment de l’arrogance dans le fait de porter un t-shirt finisher.
Les efforts demandés lors d’un trail font tout simplement que l’on est content et fier de porter le t-shirt qui montre à soi-même et aux autres que l’on est venu à bout de cet effort particulièrement intense.
Bien entendu, si on fractionne à côté de quelqu’un d’autre, on va se tirer la bourre, et peut-être se servir du t-shirt porté pour montrer qu’on en a sous le pied.
Mais comme je le mettais plus haut, le t-shirt ne présage en rien du niveau de l’athlète, si ce n’est de sa capacité à être assez fou pour s’inscrire à un trail et le finir (ou pas d’ailleurs, ayant moi-même 2 t-shirt finishers de courses pas terminées).


Et puis si vous souhaitez utiliser l’espace communicatif que représentent votre abdomen et votre dos pour des motifs plus originaux que les courses auxquelles vous avez participé, n’hésitez pas à aller jeter un œil à Douzaleur, qui est une boite montée par des copains et qui propose des t-shirt avec des messages décalés comme ‘mon groupe sanguin, D+’, qui dénote un peu lorsque l’on s’entraine sur la platitude du bois de Boulogne J

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