mardi 8 juillet 2014

Réçit de course : Trail des Glaciers de la Vanoise. 73km. 3800m D+

Compte rendu de course. Trail des Glaciers de la Vanoise 2014. 417 inscrits. 73km de course. 3800m D+.


Avant la CCC, il me fallait faire une course de montagne, pour tester les conditions de course en altitude, et se donner une idée de ce que ça va donner à Chamonix.
Chaque année, Valérie et Arnaud, des amis, nous invitent à skier à Pralognan la Vanoise. Petite station d’hiver, Pralo est en revanche une station réputée pour l’été, car le parc naturel de la Vanoise qui la surplombe, offre de superbes occasions de randonnées, trecks ou trails.
Lorsque j’ai appris qu’il y avait un trail début Juillet, je n’ai pas hésité une seconde, et me suis inscrit dans la foulée, en passant voir Mathieu et Ludovic, de l’office, en mars après avoir descendu 2/3 pistes.

Le briefing est donné le samedi après-midi. L’accent est mis sur les conditions de course difficiles. Il fera beau, mais le parcours se fait majoritairement en terrain non balisé, et peu accessible pour les secours. C’est une course de haute montagne, qui nous fait évoluer principalement entre 2000 et 2500m d’altitude, avec une pointe à 2800m !

Le réveil sonne à 3h du mat. J’avale un petit déjeuner frugal et me dirige, avec Elisabeth qui est venue m’accompagner, vers le sas de départ, qui sera donné à 4h du mat.

C’est donc un départ à la frontale, qui ne laisse aucun prélude, et nous amène directement dans la montagne.

Les 8 premiers kilomètres de course nous font faire ce que l’on appelle un KV (kilomètre vertical d’une traite). On mange donc 1000m de dénivelé non-stop jusqu’au premier ravito (ou plutôt 1100m). Le paysage est magnifique ; je me crois dans un film. On traverse des lacs de neige fondue, à la frontale, sur des dalles naturelles. 1h30 plus tard, nous voici arrivé au premier ravitaillement, au refuge du Col de la Vanoise.




Je me dis que pour moi, la course commence maintenant ! En effet, je ne suis pas là pour la gagne, ni pour faire un temps, mais pour me préparer en course de montagne. Je vais donc y aller molo, et essayer de ne pas être trop cassé à l’arrivée. D’autant plus que je me remets tout juste de mon claquage du mollet, et qu’hier, ca tirait encore !


Jusqu’au km50, la course s’annonce roulante. Des atermoiements de petites montées et descentes semblent se présenter à nous. Roulez jeunesse, c'est le moment d’engranger les kilomètres, me dis-je.
Que neni ! D’une part, nous n’aurons jamais, je dis bien JAMAIS, de plat. Soit ca descend sec, soit on a droit à des faux plats montant. Grrr…
Autre difficulté à laquelle je ne m’attendais pas également : la nature du terrain. Je croyais pouvoir avancer tranquillement sur des jolis chemins de montagne. Raté ! Le chemin que nous empruntons (le GR5) est parsemé de cailloux plus ou moins gros les uns que les autres.


Le jour commence à pointer le bout de son nez, et la chaleur se fait oppressante lorsque nous montons.
J’ai décidé de faire ce trail à l’eau claire, et je ne serai pas déçu. A chaque ravito, je rempli mon camel d’eau minérale, qui sert normalement à abreuver les randonneurs ou le bétail. L’eau est fraîche et délicieuse ; rien à voir avec le goût écoeurant des boissons énergisantes habituelles.

Entre le 1er et le 2nd ravito, il y a 15km. Psychologiquement, c’est un peu dur car je comptais sur cette partie soi-disant roulante pour avancer et dérouler les km à vive allure. Mais le terrain ne s’y prête absolument pas ; le chemin est très caillouteux, et si je ne veux pas me faire une cheville ou tomber dans le ravin, je fois faire attention à là où je mets les pieds, et ce pour chaque pas effectué !
Les paysages sont magnifiques ; on traverse des petits cours d’eau, et parfois même quelques névés, dont un sur les fesses ! Contrairement aux autres trails, on discute peu entre nous, car chacun est concentré et ‘dans sa course’. C’est mon premier trail de montagne, et sa difficulté est sans commune mesure avec ce que j’ai bien pu faire jusque là.

Je passe le 2nd ravito au refuge de l'Arpon, assez rapidement, et file tout droit vers le 3è ravito : celui de la mi-parcours, au refuge de Plan Sec. Entre ces 2 ravitos, c’est psychologiquement compliqué. Je me rends compte que je vais mettre bien plus de temps que prévu. Le sentier est en faux plat montant, ce qui rend l’effort compliqué pour avaler bien peu de dénivelé. Les cuisses commencent à chauffer sec, mais 2 choses me rassurent : je n’ai aucune crampe, et mon mollet tient correctement !
Une petite vidéo vous montrera le paysage magnifique dans lequel nous avons la chance d’évoluer.


La descente vers Plan Sec commence par une portion roulante (le film posté sur la page fb), qui me fait accélérer l'allure. Mais rapidement, après quelques lacets, le sentier se ressert et redevient caillouteux, avant d'entrer dans une portion en forêt qui me fait me demander si je ne me suis pas perdu. Il y a 15 minutes, j'évoluais en montagne, et maintenant, je cours au milieu de sapins... Il y a vraiment un refuge dans le coin? Fort heureusement, quelques balises me rassurent, et je parviens, après une nouvelle ascension, cette fois-ci de courte durée, au refuge de plan sec. Je me dirige tout droit vers les ‘parties communes’. Les crozets au reblochon de la veille me pesaient un peu sur l’estomac. J’en profite ensuite pour faire une vraie pause. Je dois m’arrêter bien 10/15 minutes à ce ravito. Je me restaure correctement, et discute avec les bénévoles de la course, fort sympathiques au demeurant.

La partie qui nous attend nous amène je crois 13km plus loin vers l’avant-dernier ravito au refuge de l'Orgère. Nous descendons vers les lacs des barrages environnants ; la vue est superbe. Désolé, je n’ai pas pris de photos, mais rien que pour cela, ça valait le détour. En revanche, qui dit descente dit remontée. Une fois arrivé au niveau du lac, il nous faut donc remonter de l’autre côté. On s’emmanche donc une belle côte d’à mon avis 400 bons mètres de D+. Les jambes commencent à durcir. J’y vais donc très mollo, et m’hydrate beaucoup pour éviter que les crampes auxquelles j’étais coutumier jusque là n’apparaissent aujourd'hui.

Nous voici donc à l’avant-dernier ravito. Il ne semblait jamais venir celui-ci ! Pour y parvenir, nous avons du encaisser une jolie descente ‘casse-pattes’, sur un chemin très caillouteux à travers les pins. Je pensais que le circuit des 25 bosses était ‘trop caillouteux’ par rapport à ce que l’on retrouve en trail classique, mais non ; ici, le terrain oscille entre rocher et cailloux. Point de terrain sec pour avancer. Remarquez, vu mon état de forme, je ne sais pas si je pourrai de toute façon allonger la foulée…

Je rempli mon camel et mange un morceau, avant de me diriger vers un des gros morceaux de l’épreuve : l'ascension du col de Chavière. 10km nous séparent du dernier ravito qui sera au refuge de Péclet Polset. 10km, c’est jouable me direz-vous. Oui, mais il nous faudra gravir 1000 ou 1200m de D+ et passer de l'autre côté de la montagne qui se trouve en face de nous. Et hop, moi qui n’en avait jamais fait, me voila parti pour un 2nd KV ! Les premiers 5km de cette ascension sont horribles ! Imaginez-vous avancer à 2 ou 3 km/h… Impossible d’aller plus vite sans s’essouffler. Il fait très chaud, je commence à cuire, et suis obligé de baisser mes manchons sous peine de rôtir comme un cochon de lait. La côte est très raide, et plus on monte, moins on a d’oxygène. Je mets bien 1h15 pour faire la première portion de 5km… Un replat pour avancer un peu, et on arrive littéralement au pied du mur ! Là, pour le coup, il fait froid... Il y a du vent... Il y a de la neige... Je dois remettre mes manchons, mon manteau, et reste malgré tout gelé. Incroyable cette différence de condition en seulement une heure !! J'approche du col, la vidéo parle d’elle-même : on voit au loin, tout là haut, des petites fourmis escalader un col enneigé !?! La pente reste raide, et nous avançons maintenant en plus dans la neige. Je n’ai pas de bâtons (je dois bien être le seul), et mes chaussures glissent. Je me retrouve souvent le bec dans la neige, et m’esquinte le pied contre les cailloux. Cette ascension se fait à 50% au mental, et à 50% à l’envie de profiter de l’instant. On se croit dans un film de haute montagne, ou dans le livre premier de cordée. Sauf qu’on est en tenu de course, et sans corde. Incroyable... J'en garderais des souvenirs toute ma vie!
Le temps me semble arrêté ! J’en profite à fond, et essaie d’oublier le manque d’oxygène qui me donne des points de côté et empêche mes muscles de bien s’oxygéner. Mes jambes vacillent, mais ce moment est unique ! Ce doit être la première fois que je passe un col, et qui plus est dans la neige J
En haut, je fais une pause, histoire de récupérer de cette ascension qui m’a un peu marqué. 1000m de D+ en 2h15, dans la neige. Il faut avouer qu’à ce moment, je suis bien assèche, avec jambes raides et souffle coupé. Mais pour le coup, je viens de vivre une expérience réellement incroyable, et hors du commun. Je suis aux anges, bien qu'un peu hagard suite à l'effort fourni.


Le dernier ravito est 3km plus bas. Jusqu’à pralo et la ligne d’arrivée, il reste 16km, uniquement en descente (enfin, presque).
Je me dis que je vais pouvoir enfin allonger la foulée, ça tombe bien, ça fait 10h que j'attends ça :-) Mais je déchante aussi sec.
Pour arriver au dernier ravito, on évolue 100% dans la neige. Imaginez-vous une pente raide, dans la neige, en courant. C’est assez comique. On passe notre temps à se casser la figure, avec comme crainte de dévaler la pente comme le capitaine Haddock dans Tintin au Tibet. Je suis trempé des pieds à la tête, et suis par la même occasion complètement gelé. Je garderai de cette descente de belles crevasses, qui me feront un mal de chien jusqu’en bas ! C'est juste incroyable. Imaginez vous en haut d'un col à 2800m d'altitude, en T-shirt, en short et en basket, en vous disant : 'Tiens, et si je redescendais par là?', en pointant du doigt une vaste nappe de neige, qui descend à perte de vue. Le tout, évidemment, sans bâtons pour s'appuyer et s'équilibrer.
Mais plus on descend, plus l’oxygène se normalise, et plus il fait chaud. Alors je me dis que je ne suis plus à ça près, et que dans tout trail, l'organisation nous garde quelques privates jokes pour la fin, parcequ'ils savent que plus c'est dur, plus on en garde un souvenir inoubliable.

Au dernier ravito, je ne m’éternise pas. Il reste tout de même 13/14km, sur un sentier pour le coup très courable. Autant en profiter. Je suis bien ; à mon grand étonnement, je n’ai toujours pas la moindre apparition de crampes. Une grande première !
Ces 13km se font dans la joie et la bonne humeur. Chaque foulée est douloureuse. Les cuisses tapent à chaque pas, mais l’on se dit qu’on n’a pas fait tout ça pour rien.
Le retour à la civilisation se fait gaiement ; les promeneurs nous encouragent, je fais connaissance avec une marmotte qui semble presque apprivoisée.


Nous longeons le cours d’eau formé par la chute des neiges.
J’apprends que je suis dans les 70 premiers ! Bon, OK, je me voyais plus beau avant de prendre le départ ; mais après 1h30 de course, je me suis tout de suite remis en questions, et me suis dis que tout compte fait, j’allais ce jour là surtout jouer les barrières horaires J C’est mon premier trail de montagne ; je devrai presque dire, de haute montagne. Je me remets de mon claquage au mollet et n’ai pour ainsi dire que 2 vraies semaines d’entrainement dans les pattes. Alors profil bas, humilité, et mon unique plaisir est de finir cette course J Quand une promeneuse me dit que je perds 3 places parce que je m’arrête filmer la marmotte, cela me fait sourire, et je ne peux m’empêcher de lui rétorquer que « j’en ai vraiment rien à fout**»…

Je passe la ligne d’arrivée après 11h40 d’une course sublime. Ce doit être sans nul doute la course la plus dure qu’il m’ait été donné de courir. Mais qu’est-ce que ça vaut le coup.

Qui plus est, je n’ai pas eu un soupçon de crampes, et mon mollet à tenu bon !

Je vais maintenant prendre 10 jours de repos, pour éviter de réitérer mon erreur de l’Ecotrail, et m’entrainer 6 bonnes semaines pour la CCC.

Si cela vous intéresse, voici les leçons techniques que je retirerai de cette course.

1)      L’équipement
Je suis parti équipé de chaussettes de compressions, et d’un simple T-shirt. Un camel back, et autour des reins, un manteau en cas de pluie ou vent fort. Les manchons aident bien pour éviter les crampes aux bras.
La seule chose qui m’ait manqué est les bâtons. Je crois que l’on était que très peu à ne pas en avoir, en tout cas dans les 100 premiers. Dans les ascensions, j’ai bien vu que j’en bavais plus que les autres, et me fatiguais pour rien… Donc cette semaine : achat de bâtons, et test en forêt de Milly sur les 25 bosses pour être prêt pour la CCC.

2)      Les ravitaillements
L’eau claire, avec du sucre dedans, c’est ce qui semble me correspondre. Lorsque je mets des poudre d’effort, cela m’écoeure, et je bois moins. Là, j’ai pu bien m’hydrater, et je pense que c’est la raison pour laquelle je n’ai pas eu de crampes.
J’ai mangé en tout : 2 gels boosters, 2 barres de céréales, 2 barres de nougat, et 2 barres de pâtes de fruits. Pas encore assez pour 11h30 de course, mais en amélioration par rapport aux courses précédentes, pendant lesquelles je ne pouvais rien avaler. Verdict : aller au plus naturel. Le nougat et les pâtes de fruit. En plus des quelques Tucs avalés aux ravitos, cela m’a suffit pour ce trail, mais j’avais un peu faim en arrivant. Pour la CCC, j’essaierai de manger un peu plus.

3)      L’entrainement
Etre passé à 90-100km par semaine me permet d’être endurant. D’où encore une fois l’absence de crampes. En revanche, j’ai une déficience notoire en dénivelé. Il me reste donc 6-7 semaines pour palier ce problème. C'est mince, mais je pense jouable.

Pour conclure, ce trail était simplement formidable ! Un grand moment de bonheur, à parcourir la montagne comme nous en avons rarement l’occasion. C’est une chance que de pouvoir faire ce type de parcours, et cela nécessite un temps de préparation considérable ; je remercie donc chaudement toute l’organisation, et l’office de Pralo, qui a fait un boulot formidable !

Petit bonus : le compte rendu Strava : http://www.strava.com/activities/163004340

La prochaine course est pour bientôt, et pas des moindres : la CCC, pour faire cette fois-ci le tour du Mont-Blanc J

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